Quand l’autrice Alice Babin m’a dit qu’elle aimerait écrire cinq histoires autour de cinq de mes bijoux, j’ai tout de suite été séduite. Quels chemins allait-elle emprunter ? Quelles micro fictions imaginerait-elle ? Avant qu’elle ne se lance, je n’avais qu’une chose à lui confier : une carte blanche.

Voici le texte sur la bague îlot :

Paloma pensait que les choses avaient une forme. Toutes les choses. Les émotions, les accidents, les conversations.

Une année, elle avait vécu une grande tempête. Un moment en forme de pluie qui tombe drue, de pluie qui fouette l’hiver. Petit à petit tout avait explosé et la vie lui était apparue pointue. Le temps, l’amour, le travail, le corps, tout était devenu une lame. Tout avait fait mal.

À l’horizontal, Paloma respirait à la recherche d’une forme qui lui convienne. Par le ventre, elle inspirait, expirait, ses mains accompagnant chaque mouvement. Son souffle comme des vagues, des vagues rondes, Paloma se voulait pleine. Voulait retrouver forme humaine.

Un jour après tout ça, Paloma portait à la laverie un panier de linge sale. C’était le grand ménage, les vents tranchants étaient tombés. Tout lui paraissait différent après cette année. Dans la rue elle ne se sentait plus la même, sur ses jambes, de part et d’autre de son corps, tout lui paraissait changé. Pourtant, devant les vitrines, Paloma se regardait et se reconnaissait. Ça faisait comme un cercle, qui venait de s’achever.

Après avoir rempli trois tambours, mis les pièces dans la machine et pressé le bouton Départ, elle était sortie. Flâner dans ce quartier qu’elle connaissait par cœur. C’est là qu’elle était tombée sur l’Ilot. En plein milieu de son reflet, cette bague l’avait attrapée. Avec son doré bombé Paloma avait tout de suite pensé à son ventre qui se soulevait ; la forme de la réconciliation. Elle était entrée et elle l’avait achetée. ILOT. C’était la bague d’une nouvelle ère. ILOT. Dans sa tête, Paloma se le prononçait. ILOT, il était rond ce mot.

Alice Babin